Paracha Beha’aloteHa : d’autres façons de faire bien.

Le don de la Torah se renouvelle chaque année. A partir de chavouot 2016, vous retrouverez sur notre site un petit commentaire actuel, une reinterprétation des vidéos « sur un pied ». N’hésitez pas à vous replonger dans le texte éternel de la Torah et de son commentaire sur le site sefarim, et à revoir les vidéos correspondantes sur notre chaine youtube…

Bonne étude!

Dans notre vie d’enfants d’Israël nous nous heurtons souvent à des obstacles pour bien faire ce que nous voulons, pour réaliser nos projets, pour être ce que nous sommes; mais ces obstacles ne nous arrêtent pas. Nous trouvons toujours des solutions que nous pensons bonnes pour nous en accommoder. Nous trouvons D’autres façons de faire bien.

Deux événements, parmi d’autres, de l’histoire juive illustrent ce sujet :

  • La célébration de Pessah – paracha Beha’aloteHa du sefer Bamidbar (chapitre 9)

Nous sommes à l’époque du tabernacle. Moïse doit répondre à une question délicate posée par des membres du peuple qui, se trouvant en état d’impureté, comprennent qu’ils ne sont pas en état de réaliser l’offrande de l’agneau pascal pour célébrer Pessah.

Ces personnes demandent à Moïse de leur trouver le moyen d’y parvenir quand même. Moïse réfléchit et voit qu’il ne sait pas. Moïse leur répond :  » Tenez vous ici et je vais écouter ce que l’Eternel vous prescrira ». La réponse de l’Éternel à Moïse est : « Dis aux enfants d’Israël que même si un homme…se trouve impur…il devra lui aussi procéder au sacrifice… Au deuxième mois, le quatorzième jour, entre les deux soirs, il devra sacrifier l’agneau, le manger avec des pains non fermentés et des légumes verts amers… » Une personne impure ne peut procéder à l’offrande sur le moment mais doit retrouver son état de pureté et y procéder le mois suivant. Elle fête PessaH avec un mois de retard. Moïse délivre cette réponse aux solliciteurs et à l’ensemble du peuple.

Et c’est ainsi que fut instauré Pessah chéni (le second Pessah) sans renoncement, en recherchant une solution adaptée à la situation. Une autre façon de faire bien fut trouvée.

  • La reconquête du Temple par les Maccabim

Après avoir reconquis le Temple de Jérusalem, les Maccabim désirent organiser une grande fête. Le Temple a été restauré. Les Maccabim pensent à la fête de Soukot (la fête des tabernacles) qu’ils n’ont pas pu célébrer comme il se doit, quelque temps avant la reconquête du Temple. Ils décident quand même de célébrer une fête de la même dimension et de la même intensité que Soukot.

Le deuxième livre des Maccabées de la bible catholique (livre non canonisé par la bible hébraïque) décrit une fête de huit jours au cours des mois de novembre ou décembre. Il s’agit tout simplement de la fête de Soukot reportée dans le temps, devenue la fête de Hanouka.

Soukot (la fête des tabernacles) perdurera et restera célébrée à la bonne date. Hanouka (la fête des lumières) deviendra une fête à part entière en fin d’année civile. Encore une fois, lorsque les nécessités de l’heure l’imposent, on trouve une autre façon de bien faire, qui perdure à travers l’histoire.

Que dire de la pratique actuelle des traditions juives ? 

Au fil du temps, l’exercice des traditions a évolué de pair avec la spiritualité.

Autrefois, l’inspiration spirituelle était concentrée au niveau des Prophètes. Ensuite elle a été transmise aux Sages du peuple d’Israël. (D’après le Talmud Baba Batra.)

Peu à peu l’étude de la Torah, l’étude des autres textes et la prise en compte de la situation du peuple Juif (quelquefois critique) se sont trouvées à la base des décisions concernant la bonne pratique des traditions. De la sorte, comme nous ne sommes plus en mesure de faire des offrandes sur l’autel du Temple aujourd’hui, l’exercice des traditions s’est retrouvé autour de la table familiale. (Selon le Talmud MenaHot.)

Afin de continuer à exister, les enfants d’Israël ont dû franchir tous les obstacles rencontrés depuis plus de trois mille ans. Ils ont dû s’adapter et être créatifs. Ainsi des créations telles que les fête de Hanouka, de Yom Hashoah et de Yom Haatsmaout sont entrées, ou commencent leur entrée, dans l’histoire du peuple Juif.

Nous ne voulons pas renoncer. Lorsque surgissent des obstacles, nous voulons agir le mieux possible. Lorsque nous ne pouvons pas simplement appliquer les règles du passé, nous savons être créatifs et nous adapter tout en restant fidèles aux valeurs et aux traditions qui sont les nôtres.

Paracha Nasso : Bénir ou être béni ?

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Bonne étude!

La bénédiction est le sujet du chapitre 6, versets 22 à 27, du sefer Bamidbar (livre des Nombres de la Torah).

« Bénir ou être béni » nous amène à parler de la bénédiction. La signification, au sens strict, du mot « bénédiction » est « le fait de dire du bien »; ce qui met sur la voie de ses sens communs : louange ou appréciation favorable. De la formule « bénir ou être béni » transparaît une notion de relation affective importante que nous allons développer.

Bénédiction et Judaïsme :

« BraHa » est la version hébraïque de « bénédiction ». Ce terme a la même racine que « breHa » qui signifie « piscine » en hébreu moderne. Cette parenté de langage met « braHa » en relation avec une source d’eau inépuisable à laquelle nous pourrons toujours nous abreuver.

« BraHa » a également un lien de parenté avec le mot « bereH » qui veut dire « genou » ou « articulation ». La raison en est que le geste de plier le genou accompagne traditionnellement les prières et les louanges adressées à Dieu. La braHa joue également un rôle d’articulation dans nos vies. Elle nous permet de prendre conscience du présent, de ce que nous vivons dans l’instant, d’en profiter et de l’orienter pour que nous articulions nos vies dans le sens qui nous fait du bien.

La bénédiction se fait de Dieu aux Hommes. Elle se pratique aussi d’un Homme envers un autre Homme ou d’un Homme envers un groupe humain particulier. C’est ainsi qu’Abraham a été béni par Dieu et qu’ensuite Abraham a béni sa descendance pour lui transmettre la bénédiction reçue.

Une expression de bénédiction très courante est « barouH ata Adonaï… » (béni sois-tu Éternel…). Selon le Talmud nous sommes censés prononcer 100 bénédictions par jour, tout au long de la journée en termes de reconnaissance, remerciements, louanges et transmission des bénédictions reçues.

Nous ne devons pas bénir l’Éternel directement. Cependant une exception est citée dans le traité braHot du Talmud, concernant rabbi Ishmaël Ben Elisha qui a été confronté à une demande de Dieu. Dieu a demandé la bénédiction à Ishmaël Ben Elisha qui, très surpris, a répondu à Dieu : « Que ce soit ta volonté que ta bienveillance l’emporte sur ta rigueur, en particulier en faveur de ton peuple des enfants d’Israël ! » (L’Éternel aurait hoché la tête en signe d’approbation.)

Et dans notre vie courante ?

Nous prononçons des braHot en signe de satisfaction (bonne odeur d’un fruit, beauté d’un paysage…), en pratiquant certains actes, ou bien pour louer l’Éternel de nous avoir choisis pour remplir une mission et des devoirs. Bénédictions simplement de bonheur : « Tu es béni Eternel, qui est bon et parfaitement bon ».

Nous prononçons aussi des braHot aux moments cruciaux de notre existence pour marquer les inflexions positives ou négatives de notre parcours de vie. Bénédiction des moments difficiles : « Tu es béni, juge de vérité ».

Parmi ces bénédictions, l’une d’elles est très émouvante : celle accordée à nos enfants le vendredi soir. Elle est en liaison directe avec la paracha Nasso et sa formulation est identique. Au chapitre 6 de Bamidbar les prêtres bénissent les enfants d’Israël en ces termes :  » Que l’Eternel te bénisse et te protège, que l’Eternel tourne sa face vers toi et t’illumine de sa splendeur, que l’Eternel t’apporte la paix ».

Les bénédictions que nous donnons ou que nous recevons nous procurent de l’apaisement et de l’encouragement. Avec elles nous profitons mieux des bons moments et vivons mieux les moments difficiles de la vie, nous transmettons le meilleur de nous-mêmes à nos proches, nous renforçons notre confiance en Dieu et les hommes… Pouvons-nous nous en passer ?

Paracha Bamidbar : sommes-nous notre nom ?

Chavouot est la fête du don de la Torah. Elle sera célébrée cette année Samedi 11 juin et dimanche 12 juin. Nous recevons une Torah renouvelée, chaque année, nous la comprenons différemment en fonction de notre expérience de vie. Nous avons décidé cette année de partager avec vous par écrit un petit commentaire actuel, une reinterprétation des vidéos « sur un pied ». N’hésitez pas à vous replonger dans le texte éternel de la Torah et de son commentaire sur le site sefarim, et à revoir les vidéos correspondantes sur notre chaine youtube…

Bonne étude!

 

Bamidbar signifie « dans le désert ».

En quoi les noms que nous portons ont-ils leur importance ? Correspondent-ils exactement à nous-mêmes ?

En général un nom est nécessaire à l’identification d’un personnage, à l’évocation de sa mémoire, à la connaissance de son ascendance et de son origine.

Qu’en est-il des enfants d’Israël ?

  • Il est courant de donner leurs noms et de les égrainer, en certaines circonstances, pour souligner leur personnalité, leurs actions, les événements qu’ils ont vécus, leur intégration dans le destin d’Israël  et la construction du judaïsme.
  • La forme hébraïque du nom des Juifs indique l’origine et la nature de la personne en citant le nom du père ou/et de la mère.
  • Sur ce thème, les écrits principaux formulent ceci :

Amida :  « Béni sois-tu, Éternel notre Dieu et Dieu de nos pères, Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac et Dieu de Jacob ».

La Amida, élément central des offices, débute par la phrase citée. Il s’agit du rappel des noms de nos pères et ancêtres, ceux qui sont à l’origine du peuple des enfants d’Israël.

Bamidbar 1:2 :  « relevez le total de toute l’assemblée des fils d’Israël… suivant le nombre des noms »

Bamidbar 1:19 :  « et il se mit en devoir de les enregistrer dans le désert du Sinaï »

Moïse, aidé par Aaron, est chargé par Dieu du recensement par leurs noms de tous les enfants d’Israël.

Bamidbar 1:20 à 1:54 :  « les enregistrés… de la tribu de Siméon furent cinquante neuf mille trois cents »

Les chefs de toutes les tribus font procéder au recensement, selon leur identité et leur rôle dans le destin du peuple, des membres de leurs tribus. Sont ainsi comptés et nommés les enfants d’Israël dans leur totalité.

Talmud Roch Hachana : 4 façons de changer le cours de notre vie sont possibles : affirmer avec force ce que nous voulons changer (tséaka), être solidaire de ceux qui nous entourent (tsedaka), jouer sur notre relation avec les autres (chinouï maassim) et changer de nom (chinouï chem).

Nous en déduisons que dans la tradition hébraïque le nom d’une personne représente l’essence même de cette personne : ainsi Abram devint Abraham, Saraï devint Sarah et Jacob devint Israël. (A noter que les enfants d’Israël sont les descendants de Sem qui fût un des ancêtres d’Abraham- d’où l’appellation « sémite ». Sem est la version francisée du terme hébreu « chem » qui signifie « nom ».

En lisant Bamidbar de 1:1 à 4:20 nous apprenons que 2 composantes caractérisent un peuple : le nombre de personnes selon une répartition interne, le nom et le profil de chaque personne.

Cependant, dans le cas des enfants d’Israël il est certain que les noms ont beaucoup plus de valeur que les nombres. Il en est ainsi car les noms des enfants d’Israël sont fortement porteurs de sens.

La paracha pour parler de la vie… VayichlaH

VayichlaH, il envoya

La dispute entre Jacob et Esaü était lourde et violente. Jacob avait dû partir, sa mère Rébécca devait l’envoyer chercher une fois la colère de son frère Esaü apaisée. 20 ont passé. Rébecca n’a pas rappelé Jacob. Au cours de ces 20 années, Jacob a épousé deux femmes et leurs deux servantes, il est devenu le propriétaire de nombreux troupeaux, il est le père de 12 enfants (11 fils et une fille). Malgré ces années et ces événements, la colère reste vive entre les deux frères. Jacob décide de faire face aux vieilles querelles et de revenir.

Qu’en pensez-vous ? Est-il normal d’avoir des querelles familiales ? Est-il simple de s’accorder avec ses frères et sœurs ? Est-il normal que les querelles durent ? Faut-il fuir la dispute, comme Jacob l’a fait, et dans quelles circonstances ? Faut-il revenir et faire face aux désagréments, comme le fait maintenant Jacob ?

Jacob va mettre en place différentes stratégies pour se protéger de la colère de son frère. Il lui envoie des cadeaux, il divise ses possessions pour éviter que tout puisse être détruit d’un seul coup, il se prépare à se défendre physiquement.

Qu’en pensez-vous ? Quelle est/ quelles sont les bonnes façons de se protéger ? Lesquelles sont préférables ?

Finalement, lorsque Jacob retrouvera Esaü, ils tomberont dans les bras l’un de l’autre.

Qu’en pensez-vous ? Est-ce crédible ? Qu’est-ce qui a pu provoquer l’apaisement d’Esaü ? Ils ne parlent pas du passé. Est-ce sain ?

Ils se sépareront ensuite, mais se retrouveront au moment de la mort de leur père Isaac.

Qu’en pensez-vous ? Pourquoi se sont-ils séparés ? Quand les grands-parents meurent, comment les enfants reprennent-ils le flambeau ? Chez qui célèbre-t-on PessaH quand les grands parents ne sont plus là pour rassembler tout le monde ?

Zététique et éthique juive – Paracha Choftim, rentrée vers 5775

Georges Charpak et Henri Broch ont publié en 2002 un livre qu’ils ont nommé « Devenez sorciers, devenez savants ».

Ils font ainsi la preuve qu’ils maitrisent l’art du titre, posant en prémices un paradoxe fondateur : il y aurait un rapport entre le fait de devenir sorcier et celui de devenir savant !
Notre tradition vibre au rythme de la deuxième proposition et nous répète : « Devenez savants ! »
En revanche, la Torah ne cesse de répéter : ne devenez pas sorciers.

Oui, nous devons devenirs savants.
Le « Talmud Torah » au sens large, l’ « étude de la torah », nous soutient dans notre identité depuis les débuts de notre histoire. En 1882, Jules Ferry a rendu l’école obligatoire pour tous en France. Sept siècles avant l’E.C., la Torah portait à l’écrit l’obligation « et tu raconteras à ton fils » « והגדת לבנך » (Ex.13 :8). En 64, Chimon ben Gamla instituait l’obligation pour chaque ville de créer une école primaire, pour permettre aux parents d’accomplir leur devoir d’enseignement.
Le « rite initiatique » juif (Bar et Bat Mitsva) est centré sur la culture : l’enfant doit savoir lire pour lui-même et pour les autres afin de prouver sa valeur dans le monde adulte. Savoir lire, étudier, cela fait partie de la vie juive, au même titre que se marier et chercher un métier. La michna Avot (5 :21) nous décline le programme de la vie : « A l’âge de cinq ans on apprend la bible, à dix ans on étudie la michna, à treize ans on s’occupe des commandements, à quinze ans on étudie le Talmud, à dix-huit ans on se marie, à vingt ans on cherche un travail, à trente ans on atteint la force, à quarante ans la sagesse, à cinquante ans les capacités de conseiller… ».

Cet amour du judaïsme pour le savoir rattache notre tradition à la conscience humaine elle-même. Depuis l’aube des temps, nous tentons, en tant qu’espèce humaine, de comprendre le monde qui nous entoure. Dans un débat avec Michel Foucault en 1971, Noam Chomsky affirmait que la capacité à reconstituer une vérité, un système de compréhension, une logique, à partir de quelques éléments seulement, était une caractéristique de l’humanité, peut-être la plus fondamentale.

Il semble que cette capacité soit une nécessité vitale pour des êtres qui, comme nous, sont doués d’une certaine compréhension, compréhension et capacité de prévision qui nous obligent sans cesse à faire face au risque de la mort. Dans ce contexte, comprendre le contexte physique et métaphysique de notre existence est perçu comme une nécessité vitale. Quels que soient le peu d’éléments mis à notre disposition, nous voulons nous rassurer en créant un système explicatif fiable, des certitudes, mêmes illusoires, sur lesquelles appuyer notre sentiment de sécurité.

Henri Broch en a obtenu confirmation lorsque, dans les années 80, il a effectué un sondage auprès de ses étudiants en science. Soixante-huit pour cent des trois cents étudiants interrogés considéraient « que la torsion du métal par le pouvoir de l’esprit était un acquis scientifique », alors quarante-huit pour cent seulement considéraient la capacité du temps à se dilater en application de la relativité d’Einstein comme plus qu’une simple spéculation théorique. C’est à la suite du choc éprouvé à ce constat qu’il a fondé la chair de Zététique à l’Université d’Aix-Sophia-Antipolis, pour promouvoir le scepticisme scientifique et l’opposer aux phénomènes prétendument paranormaux et aux pseudosciences.

Compte tenu de cet impératif de compréhension du monde, il n’est pas étonnant que l’humanité se soit de tous temps créée des dieux, des forces de références par lesquelles il devenait possible d’agir sur le monde.
Pas surprenant du tout que nous, en tant qu’espèce, nous soyons sans cesse tentés de devenir sorciers, ou de croire à des sorciers capables de nous procurer une maîtrise de notre contexte de vie qui nous fait cruellement défaut.

Notre Torah écrite et la tradition orale qui la développe s’ingénient à nous extirper de ces croyances, imaginaires, oui, mais tellement rassurantes.
Comme le dit Max Weber, les commandements prescrits aux juifs incluent « une éthique hautement rationnelle, c’est-à-dire libre de toute magie comme de toute quête irrationnelle du salut […] ».

Ainsi, lorsque nous pourrions craindre le tonnerre et les éclairs, et peut être les vénérer dans l’espoir de les contrôler, nous préférons prononcer les mots suivants :
« Tu es bénédiction Eternel notre Dieu, roi du monde, dont la force et la puissance emplissent le monde. »

Plutôt que de raconter après le déluge que le dieu El a vaincu le dieu Yam, nous affirmons, tous les matins :
« Tu es bénédiction Eternel notre Dieu, roi du monde, qui étends la terre au-dessus des eaux. »

Au lieu de nous convaincre que les forces du bien et les forces du mal luttent dans une dichotomie et un manichéisme rassurant, nous nous adressons à la même force d’unité, lorsque nous apprenons de bonnes nouvelles, et aussi lorsque nous devons faire face à de dures réalités.
« Tu es bénédiction Eternel notre Dieu, roi du monde, qui est bon et qui agit pour le mieux. »
« Tu es bénédiction Eternel notre Dieu, roi du monde, qui est le seul juge de la Vérité ultime. »

De façon récurrente, la Torah nous enjoint la plus grande prudence, le plus grand recul vis-à-vis de la tentation superstitieuse.

Nous lirons ainsi dans le richon de cette deuxième année du cycle triennal paracha choftim :

« Quand tu seras entré dans le pays que l’Éternel, ton Dieu, te donne, ne t’habitue pas à imiter les abominations de ces peuples-là. Qu’il ne se trouve personne, chez toi, qui fasse passer par le feu son fils ou sa fille; qui pratique des enchantements, qui s’adonne aux augures, à la divination, à la magie; qui emploie des charmes, qui ait recours aux évocations ou aux sortilèges ou qui interroge les morts. Car l’Éternel a horreur de quiconque fait pareilles choses; et c’est à cause de telles abominations que l’Éternel, ton Dieu, dépossède ces peuples à ton profit. Reste entièrement avec l’Éternel, ton Dieu! Car ces nations que tu vas déposséder ajoutent foi à des augures et à des enchanteurs; mais toi, ce n’est pas là ce que t’a départi l’Éternel, ton Dieu. C’est un prophète sorti de tes rangs, un de tes frères comme moi, que l’Éternel, ton Dieu, suscitera en ta faveur: c’est lui que vous devez écouter! » (Deut 18 :11-15)

Dans d’autres passages, la Torah nous enseigne que les miracles qui pourront être produits par les prophètes ne sont aucunement des garanties de véracité (Deut. 13 :2-5, paracha Réé), mais qu’au contraire, c’est la confrontation des paroles d’un prophète à la réalité qui permettra de valider sa prophétie (Deut. 18 :21,22, paracha choftim).

Voilà une méthodologie que ne renieraient peut-être pas les partisans de la Zététique.
Depuis trois mille ans, la Torah nous ouvre un chemin vers la raison et l’éthique, et ce message reste aujourd’hui de la plus grande pertinence.
Oui, face aux situations de la vie, face aux situations politiques, face à la situation en Israël, nous avons de bonnes raisons d’avoir peur.
Mais aussi, dotés de notre raison, de notre savoir, de notre amour de la vérité et de notre connaissance juive de l’âme humaine, nous devons nous souvenir des merveilleux outils que nous avons dans nos mains pour nous rassurer, pour nous élever aussi haut que possible dans la justice, le bien et l’amour de notre prochain.

La Torah nous dit : « N’apprends pas à pratiquer les abominations de ces peuples. »

לֹא-תִלְמַד לַעֲשׂוֹת, כְּתוֹעֲבֹת הַגּוֹיִם הָהֵם

Rachi développe : « N’apprends pas à pratiquer, mais apprends à comprendre et à enseigner, c’est-à-dire comprendre ce qu’ils font et combien ils sont nocifs, enseigner à tes enfants de ne pas agir de cette façon, car il s’agit de pratiques étrangères. »

לֹא תִלְמַד לַעֲשׂוֹת. אֲבָל אַתָּה לָמֵד לְהָבִין וּלְהוֹרוֹת, כְּלוֹמַר לְהָבִין מַעֲשֵׂיהֶם כַּמָּה הֵם מְקֻלְקָלִין וּלְהוֹרוֹת לְבָנֶיךָ לֹא תַּעֲשֶׂה כָּךְ וְכָךְ שֶׁזֶּה הוּא חֹק הָעוֹבְדֵי כּוֹכָבִים:

Notre tradition nous enjoint de nous éloigner de ces pratiques, mais aussi de les comprendre, pour nous en prémunir, pour enseigner comment leur résister.
C’est également ce que font Charpak et Broch, en nous proposant de comprendre les procédés d’ illusionnisme pour nous en affranchir, devenir sorciers pour désamorcer la sorcellerie, et ainsi, devenir, autant que possible, savants.

Notre tradition est une tradition d’actualité, de liberté, d’outils pour faire face aux incertitudes du monde, pour œuvrer à la cohésion humaine, à l’amour du prochain.

Qu’il nous soit donné d’y puiser avec intelligence et d’en recueillir l’élixir de jouvence concocté par Nicolas Flamel…
Euh, non, pardon, je me suis juste mélangée dans mes notes…

Que nous puissions nous abreuver à l’eau jamais assez désaltérante du savoir,
Et que le temps qui passera sur nous cette année nous rende plus sages l’an prochain que nous ne le sommes aujourd’hui !