Paracha Vayéra : es-tu le gardien de ta femme ?

Les personnes vivant en couple sont liées par une communauté de destin; ce qui implique un engagement consenti d’entraide et de solidarité entre elles.

Cet engagement ne doit pas se faire au détriment de la liberté individuelle compatible avec la vie de couple. D’autre part, il ne doit pas se pratiquer dans l’hypocrisie. L’entraide est une forme de générosité désintéressée qui respecte l’épanouissement des membres du couple.

La paracha Vayéra aborde le principe d’entraide et de solidarité dans le couple en nous dévoilant certains points des relations qu’entretiennent Abraham et Sarah. Les époux, comme les frères et sœurs, sont un peu responsables les uns des autres. Nous disons « tout Israël est garant l’un de l’autre ». Caïn a nié cette solidarité en tuant son frère, et en interpelant « Dieu »: « Suis-je la gardien de mon frère? ». Qu’en est-il dans notre paracha?  Abraham a-t-il été le gardien de sa femme, Sarah ?

Pour approfondir ce thème, une petite vidéo et un article qui la commente, sur la paracha de la semaine !

La paracha Vayéra du sefer Béréchit (Genèse) 18:1 à 22:24 et le couple Abraham-Sarah

Le couple Abraham-Sarah (qui, en début de paracha précédente, se nommait Abram-Saraï) doit retenir toute notre attention. Ce couple, par ses relations insolites, est un sujet de réflexion important sur la vie à deux.

Deux éléments de la vie de couple d’Abraham et de Sarah sont à relever.

~Premier élément : Abraham demande à Sarah de le protéger dans les situations périlleuses, pour cela, il faut qu’elle se présente comme sa sœur et non comme son épouse (ce qui est en partie vrai : Abraham et Sarah sont de même père, mais de mères différentes. Béréchit chap 20, verset 12).

Ce fut une première fois en Égypte (Paracha LèH LéHa), quand Abram prit conscience que Saraï était belle et attirante, et qu’il risquait d’être tué lors d’un éventuel rapt de Saraï.

Béréchit 12:11 à 12:13. Quand il fut sur le point d’arriver en Égypte, il dit à Saraï son épouse: « Certes, je sais que tu es une femme belle d’apparence…Il arrivera que lorsque les Égyptiens te verront, ils diront ‘c’est sa femme’, et ils me tueront, et ils te conserveront en vie…Dis, je te prie, que tu es ma sœur; et cela ira bien pour moi à cause de toi, car j’aurai grâce à toi la vie sauve. »

Ceci ce reproduit dans la paracha Vayéra avec AbiméleH, roi philistin de Guérar où Abraham souhaite résider.

Béréchit 20:1 à 20:2. Abraham quitta ce lieu pour le pays du Néguev; il s’établit entre Cadès et Chour et séjourna comme étranger à Guérar…Abraham disait de Sarah, sa femme, « Elle est ma sœur ». Là-dessus AbiméleH, roi de Guérar, envoya prendre Sarah.

Ici la solidarité s’exerce de façon surprenante, contraire à la logique et à la bienveillance. L’épouse se charge de protéger un mari qui ne se consacre pas vraiment à sa protection. En conséquence, Dieu intervient pour protéger lui-même Sarah. Et en acceptant de protéger Abraham, Sarah obtient la bénédiction divine sans l’avoir recherchée.

~Deuxième élément : Sarah se comporte de façon très discrète et effacée. Elle ne veut absolument pas se mettre en avant. Dans les versets suivants « Dieu » interpelle Abraham puis Sarah, par l’intermédiaire de 3 anges d’apparence humaine, pour annoncer qu’un fils naîtra prochainement de leur couple.

Béréchit 18:9 à 18:15. Ils lui dirent: « Où est Sarah, ta femme? » Il répondit: « Elle est ici, dans la tente »…L’un d’eux reprit: « Je reviendrai à toi l’année prochaine, à pareille époque et voici, un fils sera né à Sarah, ton épouse ». Or, Sarah écoutait à l’entrée de la tente qui se trouvait derrière lui…Mais, Abraham et Sarah étaient vieux, avancés en âge et les règles avaient cessé pour Sarah…Aussi, Sarah se mit-elle à rire en elle-même en disant: « Flétrie par l’âge, ce bonheur me serait-il réellement possible? D’ailleurs, mon époux est un vieillard. »..Alors, l’Éternel dit à Abraham: « Pourquoi Sarah a-t-elle ri en disant: est-ce-que vraiment j’enfanterai, âgée que je suis?..Est-il rien d’impossible à Dieu? Au temps fixé, à pareille époque, je te visiterai et Sarah aura un fils »…Mais Sarah se mit à nier en disant: « Je n’ai pas ri ». Elle avait peur. L’Éternel répondit à Sarah: « Mais si ! tu as bel et bien ri. »

Tout au long de ces versets, Sarah reste en arrière. Il lui semble naturel qu’Abraham, son époux, soit l’interlocuteur direct des anges envoyés par Dieu. Sarah fait preuve d’abnégation et d’humilité. Son rire discret n’est pas ironique, il traduit simplement sa surprise. De cette façon, Sarah manifeste aussi la négation de ses sentiments. Elle rit car elle a du mal à réaliser que l’Éternel puisse s’intéresser autant à elle. Cela lui semble inconcevable. Afin de dissiper le doute dans son esprit et l’encourager à s’affirmer, l’Éternel décide de s’adresser directement à elle. Sarah devient alors une personnalité du peuple hébreu à part entière.

En relatant ces faits, la Torah nous montre que l’entraide et la solidarité dans le couple ne sont pas univoques. Dans certains cas, il est tout à fait normal que la femme aide l’homme. Ce qui est conforme à la définition du terme « solidarité; » la solidarité impliquant l’interdépendance. Par ailleurs, la Torah aborde la libre expression des sentiments féminins en nous révélant une relation directe entre Dieu et Sarah en rapport avec ses pensées et ses sentiments. L’échange direct entre Dieu et Sarah sera mené à bonne fin, puisqu’un an plus tard, Isaac naîtra. Il aura donc également des répercussions positives sur la vie de couple et sur la vie familiale de nos ancêtres.

Béréchit 21:1 à 21:3. Et l’Éternel pensa à Sarah comme il l’avait dit et fit à Sarah ainsi qu’il l’avait annoncé…Sarah conçut et enfanta un fils à Abraham en sa vieillesse, au temps fixé dont Dieu lui avait parlé…Abraham nomma Isaac le fils qui venait de naître, que Sarah lui avait donné.

Interprétons bien le verset qui va suivre. Ce verset est l’expression directe des sentiments d’une femme, Sarah. Ce qui est rare dans la Torah.

Béréchit 21:6. Alors Sarah dit: « Dieu m’a préparé du rire et quiconque l’apprendra rira de moi. »

La maternité de Sarah, à un âge tardif, est un entremêlement de bonheur et de complexité. Sarah doit se montrer capable de prendre en charge son nouveau-né, en particulier de l’allaiter.

Béréchit 21:7. Elle dit encore « Qui aurait dit à Abraham que Sarah allaiterait véritablement des enfants, vu que je lui ai donné un fils en sa vieillesse? »

Sarah prend sa revanche sur la rumeur publique à double titre. Le Talmud Baba Metsia attire notre attention sur le mot « banim/enfants » (בָנִים) qui est un mot pluriel. L’explication de ce pluriel est la suivante : au cours du banquet donné en l’honneur d’Isaac, l’Éternel a produit l’irrationnel en faveur de Sarah. Toutes les mères présentes se sont soudainement trouvées incapables d’allaiter. Sarah, après sa longue incapacité en ce sens, a eu la grande joie de devoir se substituer à elles. Sarah a alors donné généreusement le sein à tous les bébés présents, des nourrissons aux enfants de 3 ans. Sarah a ainsi rayonné, aux yeux de tous, dans l’accomplissement de sa maternité.

Pour conclure : l’homme doit-il vraiment être le gardien de sa femme ?

En ce qui concerne le couple Abraham-Sarah, Abraham ne s’est pas comporté en gardien de sa femme. L’Éternel s’est substitué directement à lui en faisant de Sarah un personnage de premier plan, en élevant Sarah au statut de princesse et de matriarche du peuple hébreu.

Qu’en est-il aujourd’hui de nos relations de couple ? L’égalité et la solidarité homme/femme ont été instaurées dans notre société. L’homme et la femme, en fonction de leurs moyens, sont devenus réciproquement les gardiens l’un de l’autre, matériellement et moralement. Malheureusement, ce n’est pas le cas dans le monde entier. N’est-ce-pas une injustice à résoudre ?

Paracha LèH LéHa : les voyages forment la Genèse !

Quelques mots à propos d’Abraham, le patriarche, qui se nommait alors Abram.

Il y a environ 3900 ans (datation soumise à discussion), Térah (תרח), descendant de Sem et père d’Abram (qui ne se nomme pas encore Abraham), regroupa sa famille et ses proches, dans la ville d’Ur en Chaldée (Mésopotamie). Puis l’ensemble du groupe prit la route pour des raisons non précisées, et s’établit à Haran, ville araméenne, où Térah mourut. Alors, Dieu se manifesta et demanda à Abram de conduire le groupe d’hébreux au pays qu’il lui avait choisi, la terre de Canaan.  Contrairement à l’idée reçue, Térah était donc l’initiateur du voyage familiale, interrompu en chemin.

La lecture de la paracha LèH LéHa qui conte cet épisode, nous conduit à évoquer les multiples voyages des hébreux ainsi que ceux, plus récents, du peuple juif; et à nous interroger aussi, sur l’expression « Juif errant ».

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La paracha LèH LéHa du sefer Béréchit (Genèse) 12:1 à 17:27 et la mission confiée à Abram

Parfois nous avons besoin d’une impulsion, d’un élan pour nous décider à bouger, prendre des risques, nous investir dans un projet, affronter l’inconnu. Le nom de notre paracha, LèH LéHa, qui signifie « Va par toi-même » correspond au nom  que l’on pourrait donner en hébreu à cette impulsion.

Effectivement, l’Éternel s’adresse à Abram pour l’informer de sa mission et lui donner l’élan nécessaire à son accomplissement.

Béréchit 12:1. « Alors l’Éternel dit à Abram: « Va-t’en par toi-même de ton pays, de ton lieu de naissance et de la maison de ton père, vers la terre que je t’indiquerai . »

Dans ce type de situation, être soutenu a beaucoup d’importance. Ici, Abram a le privilège d’avoir la confiance et le soutien de Dieu pour se lancer.

Béréchit 12:2. « Je ferai de toi un grand peuple, et je te bénirai, et j’agrandirai ton nom, et tu seras une marque de bénédiction. »

Selon Rachi, le verset précédent est très parlant. Quiconque s’investit dans une mission difficile ou s’en va affronter l’inconnu prend des risques : ne pouvoir créer une famille avec une nombreuse progéniture, avoir des nécessités matérielles ou financières, se retrouver dans l’anonymat. À nous de bien connaître ces risques en de telles circonstances.

L’entreprise audacieuse d’Abram et Saraï, qui sont devenus Abraham et Sarah, est un événement à mettre en parallèle avec les risques pris par le peuple Juif tout au long de son histoire.

Le thème de la paracha est l’occasion de commenter l’expression « Juif errant ». Certains ont en eux une image déformée du peuple juif. Ils se le représentent comme un être égaré sur terre, ne sachant où aller, sans racine, se sentant partout en exil. C’est très loin de la vérité. En fait, cette expression fait référence à Caïn dans la Bible. Après qu’il eut tué son frère Abel, Dieu lui avait dit : «  Et bien, tu es maudit à cause de cette terre qui a ouvert sa bouche pour recevoir de ta main le sang de ton frère… Lorsque tu cultiveras le sol, il cessera de t’offrir sa fécondité et tu seras errant et fugitif sur la Terre. »

Ainsi, ceux qui font l’amalgame, tentent d’associer les juifs à Caïn le meurtrier et non à Abraham le « passeur ». Cette vision est héritée d’une pensée heureusement remise en cause par le concile Vatican II. Certains d’entre nous ont encore le souvenir de cette époque.

De nombreux personnages bibliques ont suivi la voie ouverte par Abraham, fondateur du monothéisme. Ils sont surtout mentionnés dans les pages de la Genèse (Béréchit) et de l’Exode (Chemot). Parmi ceux qui ont suivi ce type de parcours, citons Rebecca, Jacob, Joseph et bien-sûr Moïse avec l’ensemble des enfants d’Israël. Nous pouvons mentionner également l’exil de Babylone et la dispersion des Juifs au cours de l’occupation Romaine.

L’apport des voyages aux enfants d’Israël

Le terme d’errance a une connotation morale, comme si les juifs avaient « perdu la boussole ». Certes les juifs ont été déportés et déplacés ou chassés de nombreuses fois, et ils ont également parfois choisi de voyager. Mais associer ces déplacements à un manque de qualités humaines n’est pas juste. A travers ces voyages, le peuple Juif est volontairement allé au contact des autres peuples. Il s’est enrichi culturellement, technologiquement et spirituellement de tous ses déplacements, de tous ses rapprochements avec les autres populations. Ces rapprochements  n’ont en rien altéré l’identité juive. Au contraire, ils l’ont enrichie au plus profond d’elle-même. L’identité juive en est devenue plus forte, plus sage, plus tolérante.

Pour faire le lien avec Abraham, citons un autre verset de la paracha le concernant :

Béréchit 12:3. « Je bénirai ceux qui te béniront, et ceux qui t’outrageront, je les maudirai; et par toi seront bénies toutes les familles de la Terre. »

En 1999, Danièle Hervieu-Léger, sociologue des religions, a écrit un livre intitulé « Le pèlerin et le converti ». Cet auteur a beaucoup travaillé sur les problèmes de transmission, de conversion et de formation des identités religieuses. Elle suggère que nous entreprenions un voyage au fond de notre propre identité et que nous allions vers l’autre afin d’accéder à un enrichissement spirituel mutuel. Une autre forme de voyage.

Apprenons à tirer parti de tout type de voyage. Songeons souvent à celui d’Abram et Saraï.

Paracha NoaH : faut-il détruire l’humanité pour sauver le monde ?

Le personnage central de cette paracha est NoaH (Noé), figure légendaire de la tradition juive, reprise par la chrétienté et l’islam.

Qui n’a pas connaissance de l’histoire de l’arche de Noé ? Pourtant, cette semaine, l’histoire de l’arche de Noé ne sera pas précisément l’objet du commentaire de la paracha NoaH.

Notre propos portera essentiellement sur l’alliance que l’Éternel a institué avec NoaH. Une alliance qui eut pour principe majeur la deuxième création de l’humanité, pour les motifs que la Torah va nous dévoiler.

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La paracha NoaH du sefer Béréchit (Genèse) 6:9 à 11:32 et la décision de « re-créer » l’humanité pour sauver le monde

En quelques pages de la Torah, nous passons de la création du monde par l’Éternel qui a dit « cela est bon » (כִּי טוֹב), à l’Éternel qui a pris conscience d’avoir subi un échec le contraignant à détruire ce qu’il avait réalisé, pour tout recommencer.

Ceci, par la faute de l’Homme dont le comportement a été jugé intolérable et impossible à corriger par Dieu. Citons quelques phrases de la paracha précédente pour nous en rendre compte :

Béréchit 6:4 à 6:7. « Les nefilim (géants) parurent sur la Terre à cette époque et aussi depuis, lorsque les fils de Dieu se mêlaient aux filles des hommes et qu’elles leur donnaient des enfants…L’Éternel vit que les méfaits de l’homme se multipliaient sur la Terre, et que le produit des pensées de son cœur était uniquement et constamment mauvais…l’Éternel se ravisa d’avoir créé l’homme sur la Terre, et il s’attrista en lui…Et l’Éternel dit: j’effacerai l’homme que j’ai créé sur la surface de la Terre, depuis l’homme jusqu’à l’animal terrestre, jusqu’aux créatures volantes des cieux, car je regrette de les avoir faits. »

La dépravation humaine était telle qu’elle semblait irrécupérable et avait même contaminé le règne animal. L’Éternel a dû prendre une décision très dure.

Béréchit 6:11 à 6:13. « Or, la Terre s’était dégradée devant Dieu, et elle s’était remplie de violence…Dieu considéra que la Terre était corrompue, toute créature ayant perverti sa voie sur la Terre…Et Dieu dit à Noé: la fin de toutes les créatures est arrivée à mes yeux, parce que la Terre, à cause d’elles, est remplie d’iniquité, et je vais les détruire avec la Terre. »

Dieu a pris la décision de supprimer toute créature vivante sur la Terre. Il s’est tourné vers NoaH (Noé), le considérant comme un homme juste, pour lui confier une mission (construction de l’arche, sauvegarde des espèces…).

La justification de cette décision divine s’est posée aux sages : Hillel, Chamaï et leurs écoles. Nous la retrouvons dans le Talmud Érouvin. Fallait-il créer l’Homme au moment de la création de l’univers ? L’école de Hillel a répondu positivement. L’école de Chamaï a répondu négativement. Hillel et Chamaï ont débattu de cette question pendant 2 ans et demi pour finir par dire non. Par la suite, la discussion a dérivé sur les mesures concrètes à prendre afin que l’humanité ne retombe jamais dans la violence et le chaos.

Cependant, une autre question s’est posée, celle de la clairvoyance divine. L’Éternel s’était-il trompé ? D’autant plus, qu’en créant l’Homme il avait créé le concept de liberté. Il est écrit clairement dans le chapitre 6 de la Genèse que l’Éternel s’était ravisé de ce qu’il avait accompli et qu’il en avait été attristé. Était-ce une attitude acceptable de la part de Dieu ? Ce qui semble une faiblesse du « dieu des juifs » n’allait-il pas être retourné comme un argument contre leur tradition?

Cette question s’est retournée contre le peuple juif. Un maître spirituel, Rabbi Yehoshua Ben KorHa a été pris à parti. Une personne lui a demandé comment le Dieu des Juifs, prétendument parfait, a pu commettre une pareille erreur et quelle crédibilité accorder à un tel Dieu ? Rabbi Yehoshua Ben KorHa a répondu ceci. « Tu as été très content quand ton fils est né, et pourtant tu savais qu’il allait mourir un jour, et que ce serait très triste. Et bien, il en a été de même pour Dieu en ce qui concerne la création de l’humanité. »

L’alliance NoaHide et la tradition juive

Les juifs érudits pensent que le terme « béréchit », traduit par « au commencement », a un deuxième sens. Béréchit se décompose en « bara » et « chit ». Ces 2 mots associés signifient « création des fondements ».

L’humanité a du subir une redéfinition. Dans un premier temps, Adam et Eve sont créés, ce sont eux qui seront la graine dont naitra toute l’humanité, ils devaient être le plus lointain embranchement des familles de l’humanité. Mais lorsque leurs enfants naissent, le drame de la violence apparait et Caïn tue son frère Abel. Dans un deuxième temps : Adam et Ève ont un autre enfant, Seth qui a pour descendant NoaH. Mais de nouveau, la violence se développe, l’humanité est détruite et NoaH en sera le seul rescapé. Ainsi, nous ne sommes descendants d’Adam et Eve que par une seule lignée, celle de NoaH, qui est ainsi notre ancêtre commun.

L’Éternel a établi une nouvelle alliance avec NoaH, une alliance universelle dotée de 7 lois, l’alliance NoaHide (ou NoaHique). Cette alliance est la marque d’un nouveau départ pour l’humanité.

 Béréchit 9:8 à 9:13. « Dieu dit à Noé et à ses fils: moi, je veux établir mon alliance avec vous et avec la postérité qui vous suivra…et avec toute créature vivante qui est avec vous, oiseaux, bétail, animaux des champs qui sont avec vous, tous les animaux qui sont sortis de l’arche…Je place mon arc-en-ciel dans la nuée et il deviendra un signe d’alliance entre moi et la Terre. »

Cette histoire n’est pas juste une histoire du passé, elle s’invite régulièrement dans notre quotidien.

En effet, la tradition juive demande, chaque fois que nous apercevons un arc-en-ciel, de proclamer l’alliance NoaHide sous la forme de la bénédiction suivante :  » Tu  es source de bénédiction, Éternel notre Dieu, roi du monde, qui conserve ton alliance. « 

Pour conclure, citons le Midrach : une des raisons pour lesquels l’anéantissement n’a pas été total, lors du déluge, est qu’un des descendants de Noé est Abraham; Abraham, autre interlocuteur de Dieu, pour fonder une alliance encore plus précise, l’alliance Abrahamique.

Paracha Béréchit : avons-nous le choix ?

Nous reprenons la lecture de la Torah avec la première paracha de la Genèse, la paracha Béréchit.

La création du monde (il y a 5777 ans, selon la tradition juive) nous fait songer au principe du déterminisme. Ne sommes-nous que de simples pièces d’un système de causes et de conséquences ? Ne sommes-nous que des éléments de matière au sens des sciences exactes, sans pouvoir sur notre destinée ? Pour parler simplement, avons-nous le choix ?

La paracha Béréchit nous met sur la voie, en attirant notre attention sur les spécificités humaines en rapport avec cette problématique.

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La paracha Béréchit du sefer Béréchit (Genèse) 1:1 à 6:8 et la question du choix

Bien évidemment, aucun d’entre nous n’a été témoin de la création du monde. En revanche, nous avons tous une connaissance concrète de l’existence de la matière.

La question se pose, pour les rationalistes comme pour les mystiques, de savoir si l’être humain est totalement prisonnier du déterminisme (le principe de causalité), ou bien s’il dispose d’un degré de liberté dans le choix de sa destinée. Cependant, si nous bénéficions de ce degré de liberté, de quel type est la liaison entre notre liberté non matérielle et notre corps fait de matière.

La paracha Béréchit est le récit de la création de l’univers dans son ensemble. En fait, les premiers chapitres de cette paracha nous font des récits sensiblement différents de cet événement. À la question du choix qui pourrait être le nôtre, un élément de réponse est déjà donné par la structure même du texte de la paracha. La création de l’humanité est exposée de plusieurs façons. Libre à nous de choisir celle qui nous paraît nous représenter le mieux.

D’ailleurs, un principe philosophique consiste à définir la conscience comme la faculté qu’a l’être humain de se représenter ce qu’il est, de se regarder lui-même. De la sorte, nous existons en tant qu’objets et en tant que sujets capables d’examiner les objets que nous sommes.

Nous allons nous concentrer sur 2 récits de la paracha ayant pour objet la création du couple homme-femme et la connaissance du bien et du mal.

Récit du chapitre 1 :

Béréchit 1:27. « Et l’Éternel créa l’Homme à son image. À l’image de Dieu il le créa. Mâle et femelle furent créés à la fois. »

Adam harichon, le premier humain, a été créé. L’homme, Adam, et la femme, Ève, n’ont fait qu’un à la création. Peu après Ève a été dissociée d’Adam. Ce récit, qui a pour pivot le mot « bara » (בָּרָא), verbe de la création, est totalement égalitaire envers les 2 sexes.

Béréchit 1:29. « Dieu ajouta: voici que je vous accorde toute plante portant semence, sur toute la face de la terre, et tout arbre avec des fruits portant semence. Ils vous serviront de nourriture. »

Dans ce verset du chapitre 1, l’arbre de la connaissance du bien et du mal n’est pas mentionné. Les fruits de tous les arbres, sans exception, sont offerts à Adam et Ève.

Récit du chapitre 2 :

Béréchit 2:7. « Alors, l’Éternel, Dieu façonna l’Homme avec la poussière du sol et souffla dans ses narines le souffle de la vie, et l’Homme devint un être vivant. »

D’après ce texte, l’Homme a été construit par Dieu, et c’est un souffle de Dieu qui l’a rendu vivant. Un caractère divin est entré en l’Homme à sa création. L’Homme serait donc d’une double essence : essence matérielle avec son corps et essence divine avec la vie. Ainsi, par la volonté de Dieu, l’Homme s’est retrouvé doté de la raison, de la conscience, de la liberté de pensée et d’action .

Béréchit 2:16 à 2:17. « L’Éternel, Dieu donna un ordre à l’Homme, en disant: tous les arbres du jardin, tu peux t’en nourrir à satiété…Mais l’arbre de la connaissance du bien et du mal, tu n’en mangeras pas: car du jour où tu en mangeras, tu devras mourir. »

L’Homme s’est vu interdire la consommation du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Mais Dieu a rendu accessible à l’Homme ce fruit interdit, en l’investissant de la raison et de la liberté d’action. L’Homme s’est retrouvé délibérément soumis à la tentation par Dieu; Dieu qui avait planté l’arbre de la connaissance en plein milieu du jardin d’Éden.

Nous pouvons faire le parallèle avec un mythe antique de la connaissance, celui du vol par Prométhée du savoir des dieux. Après le vol, Prométhée a transmis le savoir des dieux aux hommes sous une forme dissimulée du feu sacré, en s’attirant les foudres de Zeus, le roi des dieux. Dans le récit de la Torah, c’est l’être humain lui-même, en tant que représentant de toute l’humanité, qui se saisit du savoir. Le savoir ne lui était pas caché, mais lui était rendu accessible par Dieu lui-même. Resterait à élucider la question de la transgression que représente l’accès au savoir, et qui est bien plus complexe qu’une simple interdiction.

La suite des événements se situe au chapitre 3 de la paracha :

Béréchit 3:6 à 3:7. « La femme jugea que l’arbre était bon pour la nourriture, qu’il était attrayant à la vue, précieux pour le savoir; elle cueillit de son fruit et en mangea; puis en donna à son mari, et il en mangea…Alors leurs yeux à tous deux s’ouvrirent, et ils se rendirent compte  qu’ils étaient nus; ils cousirent ensemble des feuilles de figuier, et s’en firent des pagnes. »

Ève a mis à profit la liberté accordée par l’Éternel pour transgresser son injonction et inviter Adam à la transgresser également. Le courroux de l’Éternel s’est alors exercé sur Ève et Adam :

Béréchit 3:16 à 3:19. « À la femme il a dit:..tu enfanteras dans la douleur; la passion t’attirera vers ton mari, et il te dominera…Et à l’homme il a dit:..c‘est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, jusqu’à ce que tu retournes à la terre d’où tu as été tiré: car poussière tu fus, et poussière tu redeviendras. »

Le message délivré par la paracha

Grâce au fruit de la connaissance, l’être humain est libre; à cause de ce fruit, il ne peut plus être éternel.

Ce qui permet à l’Homme de vivre libre est ce qui fait qu’il doit mourir.

La lecture de la paracha nous montre à quel point la liberté est précieuse et risquée. Adam et Ève ont pris le risque de la liberté. En conséquence de leur transgression, l’Homme est devenu mortel. Depuis, son éternité s’exerce par la continuité de l’espèce humaine : la naissance, l’existence, la reproduction, la transmission du savoir, la mort. La mort qui est la garantie d’un renouvellement permanent dans la continuité.

La liberté nous donne le choix de notre destinée de façon très relative. Elle ne nous offre aucune certitude. La liberté est d’une autre dimension que celle de l’espèce humaine, elle n’est pas du domaine de la causalité, elle peut nous dépasser. Nous devons la gouverner du mieux possible dans les choix qui se présentent à nous.

 

 

Paracha Vézot habéraHa : répétition ou renouveau ?

Que serait une vie uniforme et sans changement ? Que représente le changement dans notre existence ?

Nos caractéristiques physiques et intellectuelles d’êtres vivants changent, bien-sûr, avec l’âge. Le travail, l’habitat, la famille, les relations affectives et beaucoup d’autres facteurs induisent également des inflexions de notre parcours de vie.

Certains changements sont subis et d’autres voulus, certains apportent un renouveau conséquent et d’autres non. La constance et la répétition ont aussi leur part dans notre cheminement.

Penchons-nous sur le cas des enfants d’Israël à la fin de la Torah. Ils sont sur le point d’affronter un double changement qui va bouleverser leur existence : la disparition de Moïse et l’entrée en terre de Canaan. La paracha Vézot habéraHa met en lumière des points clés de cet événement.

Pour approfondir ce thème, une petite vidéo et un article qui la commente, sur la paracha de la semaine !

La paracha Vézot habéraHa du sefer Devarim (Deutéronome) 33:1 à 34:12

La paracha Vézot habéraHa est la dernière paracha de la Torah. (Elle est lue spécifiquement le jour de SimHat Torah.) « Vézot habéraHa » signifie « Et c’est la bénédiction ». Ainsi, la paracha débute par la bénédiction du peuple d’Israël par Moïse avant sa fin toute proche.

Devarim 33:1. « Or, voici la bénédiction dont Moïse, l’homme de Dieu, bénit les enfants d’Israël avant de mourir. »

Cette paracha marque un changement immense : Moïse va partir pour toujours. Ce changement, c’est la disparition d’un père spirituel aimé, la disparition d’un guide irremplaçable depuis la sortie d’Égypte jusqu’à l’arrivée aux frontières de la terre promise et depuis le don de la Torah. A ce moment, ceux qui vont entrer en terre de Canaan sont tous nés au cours des 40 ans de parcours dans le désert et n’ont connu qu’un seul guide, Moïse.

La séparation définitive entre le peuple d’Israël et Moïse est un véritable défi de renouveau. Dans le désert les enfants d’Israël étaient pris en charge par Moïse, ils recevaient la manne comme nourriture, leurs autres besoins matériels étaient toujours satisfaits, et comme la tradition le dit, « leurs vêtements et leurs chaussures ne s’usaient jamais ». Ils vont se retrouver seuls face à leur sort et en devenir responsables. Ils vont ressentir l’angoisse accompagnant tout changement de ce type.

La peur du changement est si forte, qu’à propos d’un verset de la paracha VayéleH, la tradition dit ceci : Moïse a dû, lui-même, partir à la recherche des membres de son peuple pour leur faire une importante déclaration. Les enfants d’Israël se tenaient alors volontairement éloignés de lui. Ils savaient que Moïse devait leur donner les 613 commandements de la Torah et ils n’en avaient reçu que 611. Afin de faire obstacle à sa mort, ils restaient loin de lui pour l’empêcher de leur remettre les 2 commandements manquants, comme il était obligé de le faire. Et pour remplir son devoir, Moïse a dû aller à leur rencontre.

Dans notre paracha, les enfants d’Israël sont contraints de faire leurs adieux à Moïse. C’est la fin d’une époque. Cependant, la continuité est assurée, car l’entrée en terre de Canaan est la réponse à une promesse faite par Dieu à Abraham, Isaac, Jacob, Sarah, Rebecca, Rachel et Léa au cours d’une autre époque.

Un élément de renouveau survient cependant :

Devarim 34:10. « Mais il n’a plus paru, en Israël, un prophète tel que Moïse, avec qui l’Éternel communiquait face à face ».

Mais ne sautons pas le verset précédent qui reste dans la continuité :

Devarim 34:9. « Or, Josué, fils de Noun, était plein de l’esprit de sagesse, parce que Moïse lui avait imposé les mains; et les enfants d’Israël lui obéirent et agirent comme l’Éternel l’avait prescrit à Moïse. »

Le renouveau dans la continuité

Le renouveau et la répétition dans la continuité peuvent-être quasiment simultanés. Ainsi, lors de la fête de SimHat Torah, Béréchit s’enchaîne immédiatement après Vézot habéraHa. Ici le renouveau se fait dans la continuité. Tous les ans, nous accomplissons un saut dans l’histoire en revenant à la création du monde, au début de la Torah. Entre-temps nous avons acquis de nouvelles connaissances, de nouveaux éléments de sagesse et vécu de nouvelles expériences. Et là, le renouveau se trouve dans l’interprétation toujours actualisée des textes de la Torah.

Avant de conclure lisons le dernier verset de la paracha, donc de la Torah :

Devarim 34:12. « …ainsi qu’à cette main puissante, et à toutes ces imposantes merveilles, que Moïse accomplit aux yeux de tout Israël ».

« Tout Israël » est encore une fois évoqué. A noter le lien entre le « lamed » final d’Israël (יִשְׂרָאֵל) et le « beit » du début de Béréchit (בְּרֵאשִׁית). Ces 2 lettres associées forment le mot « Lev » (לב) qui signifie « cœur ».

Donc, du fond de notre cœur, identifions et choisissons nous-mêmes ce qui est rupture et ce qui est continuité au seuil de la nouvelle année. Mettons en œuvre notre liberté de voir le monde à notre gré. Nous ne sommes pas toujours pleinement conscients de l’étendue de nos possibilités, ne restons pas prisonniers de nos limitations. Répétition ou renouveau dans notre vie ? La liberté est un capital que nous voulons investir en connaissance de cause.

 

 

La voix de Dieu, c’est l’humanité qui vit en nous – Dracha Kipour 5777

Ce n’est pas exactement ce que j’ai dit à la synagogue mardi soir… Mais c’est bien le texte que j’avais sous les yeux ;-). Encore chana tova à toutes et à tous.

Die20160928_130318u lui-même semble parfois impuissant.
Que dire alors de notre impuissance à nous !

Dieu lui-même laisse commettre en son nom des atrocités inacceptables.
Lorsque des religions se dénigrent et s’assassinent, c’est le nom de dieu lui-même qui est désacralisé.
Quel est le sens de cet apparent « silence de dieu » ?
Comment Dieu lui-elle-même peut-il-elle rester sans voix?

Le traité avoda zara nous raconte à la page 54b une histoire étrange.
Des sages romains ont interpelé des sages d’Israël.
« Si votre dieu ne désire pas l’idolâtrie, pour quelle raison ne l’annule-t-il pas ? »
Excellent question qui nous interpelle à notre époque, où certains se revendiquent de Dieu pour commettre des meurtres.
Les sages d’Israël ont répondu :
« Si les idolâtres prenaient pour objet d’adoration des choses inutiles, Dieu les détruirait, mais ils servent le soleil, la lune et les étoiles, Dieu doit-il détruire la création pour mettre fin aux pratiques meurtrières des hommes ? Le monde se conduit selon ses principes, et les fous qui le détruisent finiront par être jugés. »
La violence ne peut pas détruire le mal, car le mal et le bien sont liés, le soleil et la lune sont puissants, pour cette même raison nous avons besoin d’eux, pour cette même raison certains leurs ont voué dans l’antiquité une adoration idolâtre.
De même, la liberté et l’intelligence de l’homme. La liberté et la créativité des humains sont puissantes pour cette raison nous avons besoin d’eux, même si certains en font un usage destructeur.

Dans l’instant, nous pourrions être tentés de chercher ce que Paul Watslavick appelle une « ultra-solution », une solution si absolue qu’elle semble tout résoudre, alors qu’elle renforce encore le problème.
Dieu pourrait détruire tout ce qui prête à confusion, tous ceux qui se revendiquent abusivement de son nom. Comme nous l’enseigne le talmud, ce serait une ultra-solution. Pour sauver le monde, détruisons-le !
D’autres penchent vers des ultra-solutions de tous ordres : Ceux qui s’imaginent promouvoir la tradition en forçant les juifs à mettre les téfilines (je parle de ceux qui forcent littéralement, il y en a, ainsi que je l’ai appris récemment), ceux qui prônent l’assimilation  pour éviter l’antisémitisme, ceux qui pensent que le repli identitaire nous protégerait, ceux qui prônent la fermeture des frontières pour protéger l’économie etc…

Notre page du talmud continue, les sages donnent des exemples :
Le blé volé devrait-il ne pas pousser ? Le monde poursuit son cours, et les fous qui le détruisent finiront par être jugés, העולם כמנהגו נוהג.

Mais nous sommes un peuple ancien. En plus de 3000 ans, nous avons acquis un savoir, qui nous autorise à une certaine patience. Nous savons ce qu’est le temps. Nous avons vu défiler les civilisations trop pressées qui voulaient conquérir le monde.

Si nous sommes parfois impuissants dans l’instant, dans le temps au contraire, nos efforts sont cumulatifs.
Dans le temps, nous sommes puissants.

Nous nous tournons vers l’année écoulée.

Cette année écoulée, nous la regardons avec fierté, nous savons ce que nous avons accompli, ce que nous avons réussi, combien nous avons su changer le monde en dépit des épreuves. Ces réussites sont des marques de notre puissance. Pour cela, la BraHa, les remerciements s’imposent.

Cette année écoulée, nous la regardons avec humilité, nous savons ce que nous pouvons améliorer, les défauts personnels que nous pouvons combattre, les qualités personnelles que nous pouvons développer, et les collaborations avec autrui que nous pouvons mettre en œuvre, pour qu’ils puissent compenser nos manques, et que nous puissions aider à compenser les leurs. Cette humilité est, elle aussi, l’une de nos forces, une expression de puissance. Pour cela, la téchouva, l’amélioration de soi-même est de rigueur.

Nous sommes puissants car d’année en année et de siècle en siècle nous renforçons un mouvement vers plus d’intelligence, plus d’humanité.

C’est cela le judaïsme. Un mouvement. Un mouvement parmi d’autre, un mouvement qui nous est cher, le nôtre. Un mouvement vers une recherche permanente de nous élever en tant qu’humains, à notre façon particulière, à travers notre judaïsme.

C’est cela notre communauté. Une synagogue qui appartient à un mouvement. Une synagogue qui est un petit îlot de paix et de volonté, un petit îlot qui fait que l’océan entier semble moins menaçant, une seule petite étoile de laquelle monte un rire qui change le sens du ciel tout entier.

Vous qui militez pour notre communauté depuis des dizaines d’années, vous qui nous avez rejoint récemment, vous qui y trouvez votre place d’une façon sans cesse plus juste et plus satisfaisante, vous savez de quoi je parle.

Je parle de garder les valeurs juives au cœur de la synagogue, d’être humain, au-delà des considérations politiques.
Je parle de défendre d’une façon ouverte et pacifique l’existence d’une religion/communauté/spiritualité ouverte aux autres.

Je parle de ce défi dont nous sommes des Héraults (les portes-drapeaux), aux côtés de nos partenaires.
Défi de faire respecter le judaïsme libéral au sein du judaïsme global et de ceux qui en son sein font parfois preuve de beaucoup de fermeture,
défi de faire respecter le judaïsme tellement minoritaire au sein d’une communauté nationale dont certains tendent aux amalgames,
défi de promouvoir un engagement spirituel qui se pose en partenaire de la platte-forme laïque et humaniste à laquelle nous sommes attachés par-dessus tout.

En défendant notre judaïsme, en défendant la liberté, nous ne défendons pas seulement nos intérêts, nous défendons surtout le droit de chacun et chacune à trouver un chemin harmonieux.

Ces combats se jouent au quotidien, avec nos familles, nos amis, face à la pression du monde extérieur, trouver un moment pour acheter des Halot pour chabat, trouver quelques minutes pour voir une vidéo « sur un pied », trouver de l’inspiration pour raconter une blague juive en accompagnant ses enfants sur le chemin de l’école.
Ces combats se jouent dans l’exceptionnel, dans l’organisation des fêtes juives, dans la mise en place d’un cours d’entrée dans le judaïsme, d’un programme de conversion, dans la participation à des conférences interreligieuses, que ce soit cordoba, la formation de l’école nationale de la magistrature, le bné brit de bordeau etc…

Chaque petit choix juste est une victoire, car il nous oriente davantage vers la bonne direction, pour le reste de notre vie, et pour plus encore à travers le partage et la transmission.

C’est chacun de ces combats pacifiques qui sont l’objet de nos pensées et de nos résolutions en ce jour de Kipour.

Ce n’est pas chose facile. Car pour exercer notre responsabilité, nous devons faire preuve à la fois d’ambition et de résignation, de désir ardent et de patience.
Trop d’enthousiasme, d’ambition et de désir nous mèneraient à la frustration et au désespoir.
Trop de résignation et d’auto-satisfaction nous mènerait à l’immobilisme, comme si nous passions dans ce monde sans y laisser de trace.

L’équilibre est difficile à trouver et se cultive au quotidien. Les fêtes de Tichri nous proposent deux temps de régulation : Yom Kipour et SimHat Torah.
Yom Kipour, pour tendre l’arc de nos volontés, SimHat Torah, pour goûter les joies de la réussite.
Avec ces deux fêtes, notre tradition nous propose deux notions : Le din et le RaHamim.
Le din pour être rigoureux et conscients des enjeux, le raHamim pour être apaisés et tolérants pour nous et autrui.

Le raHamim, c’est la bienveillance, la souplesse, l’accueil de l’imperfection, c’est l’utérus, ce qui nous contient, ce qui nous nourrit, quelles que soient les circonstances. Cette notion est liée au nom éternel de dieu, au nom secret, au nom en 4 lettres, celui que nous remplaçons par le mot « adonaï », le grand nom qui inscrit dans le temps, dans la durée, dans la patience, dans l’évolution. Avec le raHamim, Dieu ne nous juge pas mais nous accompagne, nous ne sommes pas ses serviteurs, mais ses enfants. RaHamim est la qualité dont l’adjectif se dit « raHoum », comme dans les 13 attributs de dieu, adonaï adonaï el RAHOUM : Eternel Eternel dieu raHoum compatissant et gracieux, lent à la colère et grand dans ta bienveillance et ta vérité qui porte sa bienveillance pour les milles générations à venir, qui porte la faute et l’atteinte et le pêché et oublie.

Le Din, c’est le jugement, les conséquences directes et inéluctables de nos actes, le monde de l’ nature dont les lois sont impitoyables. Cette notion est liée au nom immanent de Dieu, « élohim », la force. Lorsque nous prononçons les 13 attributs de dieu, nous faisons semblant d’oublier cette dimension en omettant la fin du verset : « qui porte la faute et l’atteinte et le pêché et qui n’oublie PAS ».

En ce jour de Kipour, notre devoir est de repenser ces deux valeurs, de les soupeser, de les équilibrer.

De ne pas nous laisser endormir dans notre trop grand confort ou de ne pas nous laisser écrouler sous le trop grand poids de nos épreuves.

Tant que nous sommes en mouvement, nous pouvons beaucoup, et Dieu lui-même n’est plus impuissant.

Nous pouvons dire : tu es notre Dieu car nous sommes ton peuple, Tu es notre père car nous sommes tes enfants, Tu est notre force car nous étudions grâce à toi.

Et ainsi, Dieu est puissant, même dans l’hypothèse où il n’existerait pas, les mots et les concepts abstraits n’ont pas tellement d’importance, notre détermination, elle, est fondamentale.

Et la plus petite étincelle de sagesse que vous récolterez en ce jour de Kipour, aura une influence exponentielle sur toute votre année à venir, et par ricochet, sur vos proches, et sur nous, votre communauté.

De même, les nombreuses étincelles de sagesse recueillies au cours de l’année passée ont été un trésor sans prix pour l’année incroyable que nous avons passée ensemble.
Vous en voyez quelques fruits aujourd’hui, vous en verrez les merveilles tout au long de cette année, pensez à en profiter.

Alors partons ensemble en ce jour de Kipour à la récolte des sagesses pour les rendre plus actives dans nos vies.

Paracha Haazinou : recommencement ou continuité ?

Le cycle de lecture de la Torah, paracha après paracha, s’accomplit depuis près de 2600 ans. Cette tradition a débuté peu après la destruction du Temple de Salomon par les armées du roi Nabuchodonosor.

La paracha Haazinou est l’avant dernière paracha de la Torah.

La lecture cyclique de la Torah va donc bientôt s’achever. Moïse, être humain éphémère, se prépare à quitter pour toujours les enfants d’Israël. La question de la continuité de l’alliance éternelle entre Dieu et les hommes, au delà de Moïse, est le sujet majeur de la paracha Haazinou.

Pour approfondir ce thème, une petite vidéo et un article qui la commente, sur la paracha de la semaine !

La paracha Haazinou du sefer Devarim (Deutéronome) 32:1 à 32:52

Question : comment assurer la continuité de l’alliance ? Autre question à greffer sur celle-ci : comment assurer la continuité du monde ?

Dans notre paracha, Moïse ne s’adresse pas aux enfants d’Israël, mais au cosmos dans sa globalité. Il s’exprime sur l’alliance éternelle au moyen d’une admirable poésie.

Devarim 32:1. « Écoutez, les cieux, je vais parler; et que la terre entende les paroles de ma bouche. »

Devarim 32:2 à 32:43. « Que mon instruction s’épande comme la pluie, que mes paroles distillent comme la rosée, comme de douces ondées sur les plantes, et comme de fortes averses sur la végétation!…….Nations, félicitez son peuple, car Dieu venge le sang de ses serviteurs; il exerce sa vindicte sur ses ennemis, réhabilite et sa terre et son peuple! »

Par la bouche de Moïse, c’est Dieu qui interpelle le ciel et la terre pour déclarer la continuité de l’alliance. Les termes employés sont tels que la continuité de l’alliance apparaît comme une condition posée à l’existence du ciel et de la terre.

La poésie déclamée par Moïse appelle à la continuité éternelle de l’alliance en évoquant des éléments dépassant l’être humain. De la sorte notre être est considéré dans sa relation au monde, nous sommes des individus, ET nous appartenons à un peuple, ET nous faisons partie d’un univers qui nous dépasse.

« Ecoutez » ( הַאֲזִינוּ haazinou). Le mot « écoutez » (haazinou) est proche en hébreu du terme « oreille » (ozen). L’oreille est un organe nous servant à capter les sons, à être en connexion avec le monde extérieur. L’oreille, par sa partie interne gère notre équilibre, nous permet de nous positionner dans l’espace et d’avoir le sens de notre état matériel. Le terme hébreu « izoun », apparenté à « ozen », fait référence à l’équilibre sur un plan général, physique comme intérieur.

A l’approche de Yom Kipour, nous sommes sensible à ce champs lexical. Le mot hébreu « mozaim », qui signifie « balance », en fait également partie. La balance est un outil servant à peser des objets concrets. Par extension, mettre en balance signifie soupeser, comparer des situations ou des faits immatériels. Citons sur ce sujet un excellent midrach. Selon ce midrach, nous devons considérer que l’ensemble de nos actes est disposé en permanence sur les plateaux d’une balance, les bonnes actions d’un côté, les erreurs de l’autre. Nous devons considérer que les plateaux de la balance sont à l’équilibre, de telle sorte que toute action bonne ou mauvaise est susceptible d’en inverser l’équilibre. Alors pensons bien, en cette période de recommencement, que tous nos actes seront pris en compte.

Parlons maintenant de la conscience. « Conscience » se dit en hébreu « matspoun ». Terme proche de « matspen » qui signifie « boussole ». Imaginons notre conscience comme une boussole intérieure qui nous oriente dans nos actes, qui nous oriente vis-à-vis des autres et, pourquoi pas, dans l’infini de l’espace.

Revenons sur le verset 32:1 de la paracha. Il y est fait appel aux cieux et à la terre. Relisons maintenant le verset 1:1 de Béréchit (la Genèse) :

Béréchit 1:1. « Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre ».

Comment ne pas percevoir le lien établi entre la fin du cycle de la Torah et son recommencement ?

Recommencement ou continuité ?

D’où vient la continuité de l’alliance ? Sans doute, du fait qu’elle est destinée à un peuple inscrit dans la durée; un peuple dont la tradition est intégrée au cycle naturel du temps. Sans doute aussi, du fait que la tradition juive s’adapte, dans sa pratique, à son époque mais reste immuable dans ses fondements.

Ainsi, à chaque chabbat nous prenons conscience d’un recommencement périodique inscrit dans la continuité : la continuité de l’alliance, de l’humanité et du monde.

Par ailleurs, la tradition juive nous enseigne que la continuité du monde est liée à la sagesse humaine et, en ce qui nous concerne, à notre sagesse personnelle de membres du peuple juif.

Nous devons donc, en tant qu’êtres humains (en également en tant que juifs), être conscients du fait que nous sommes chargés d’une part de responsabilité de la sauvegarde de l’humanité. De plus, nous devons être conscients d’une réalité élémentaire : la sauvegarde de l’humanité est intimement liée à celle de son substrat et environnement, le monde. Donc nous devons accepter aussi, une part de responsabilité de la continuité du monde qui nous porte et nous entoure. 

Paracha VayéleH : comment rassembler un peuple divisé ?

On parle, à juste titre, du peuple juif comme d’un peuple relativement uni et ayant le sens de la communauté. Il faut souligner que la communauté juive n’est fragmentée qu’en apparence. Elle fait fait preuve de diversité dans la pratique religieuse, mais sans division absolue, sans fracture. Il n’existe qu’une seule religion juive, le judaïsme.

La question de l’unité du peuple d’Israël, autrement dit du peuple juif, se pose depuis l’origine. Moïse s’est posé cette question sans doute le premier. L’unité d’un peuple passe par le partage des valeurs, l’équité et l’amour du prochain. L’amour du prochain est un principe majeur du peuple juif. L’éparpillement de ses membres n’a jamais été un obstacle à ce principe.

Notre paracha se situe presque à la fin du Deutéronome. Moïse prépare les enfants d’Israël à son départ définitif. Un désir le tourmente, celui de résoudre les divisions de son peuple et d’obtenir une unité immuable, non seulement pour l’entrée en terre de Canaan, mais pour un futur sans limite.

La paracha  VayéleH est l’objet de cette importante question.

Pour approfondir ce thème, une petite vidéo et un article qui la commente, sur la paracha de la semaine !

La paracha VayéleH du sefer Devarim (Deutéronome) 31:1 à 31:30, et l’unité du peuple d’Israël

La paracha VayéleH contient un commandement important, le commandement de Hakel. (« Hakel » se traduit par « rassemble ». Hakel est de la même racine que « kéhilla », signifiant « communauté ». Une Synagogue est une kéhilla, un lieu ou l’on se rassemble.)

Moïse expose le commandement de Hakel aux prêtres, aux lévites et aux sages d’Israël.

Devarim 31:10 à 31:13. « Et Moïse leur ordonna ce qui suit: à la fin de chaque septième année, à l’époque de l’année de rémission, lors de la fête des cabanes, alors que tout Israël vient comparaître devant l’Éternel, ton Dieu, dans l’endroit qu’il aura choisi, tu feras lecture de cette loi devant tout Israël, qui écoutera attentivement. Tu y rassembleras tout le peuple, les hommes et les femmes et les enfants, ainsi que l’étranger qui est dans tes murs, afin qu’ils entendent et s’instruisent, et révèrent l’Éternel, votre Dieu, et s’appliquent à pratiquer toutes les paroles de cette loi; et que leurs enfants, qui ne savent pas encore, entendent aussi, et qu’ils apprennent à révérer l’Éternel, votre Dieu, tant que vous vivrez sur le sol pour la possession duquel vous allez passer le Jourdain. »

Le commandement de Hakel a 2 exigences : le rassemblement spirituel et le rassemblement physique des enfants d’Israël. Il demande le rassemblement de tout le peuple d’Israël, dans le Temple de Jérusalem, à la fin de l’année de la chmitah (rémission, tous les 7 ans), pendant la fête de Soukot (fête des cabanes). L’objectif est que le peuple écoute la lecture de longs passages du Deutéronome.

La fête de Soukot est la fête pendant laquelle il est fait abstraction des inégalités sociales. La fin de l’année de la chmitah est le temps ou chacun est débarrassé de son fardeau de dettes, le temps du recommencement et de la cohésion du peuple.

Moïse emploi les termes « kol Israël » (כָל יִשְׂרָאֵל), tout Israël. Le peuple d’Israël est concerné dans sa totalité, les hommes (הָאֲנָשִׁים), et les femmes (וְהַנָּשִׁים), et les enfants (וְהַטַּף) et l’étranger ( והגר ).

La paracha VayéleH est lue entre Roch Hachana et Yom Kipour, pendant les 10 jours de Téchouva (repentance), les 10 jours de recommencement. A ce moment, nous sommes tous rassemblés pour nous recueillir, nous repentir, étudier, comprendre et parcourir spirituellement le chemin du peuple juif. Nous nous trouvons, à ce moment là, dans une situation répondant au commandement de Hakel.

Revenons à la Téchouva. Elle est la démarche de recommencement par la reconnaissance des fautes et la prise d’engagements. La Téchouva demande aussi que nous nous tournions les uns vers les autres, afin que les relations affectives soient régénérées. (En analyse transactionnelle on appelle cela « décoller les timbres ». Ce concept découle du principe qu’un grand nombre de toutes petites choses perturbent souvent les relations entre individus. Ces toutes petites choses sont à identifier et à neutraliser par la rencontre et le dialogue.)

Avant Yom Kipour nous nous tournons les uns vers les autres pour donner un nouveau départ à nos relations. Au moment d’honorer cette fête nous nous rassemblons physiquement et spirituellement à la Synagogue. C’est sans doute là que se trouve la correspondance avec le commandement de Hakel.

Le message à tirer pour l’unité du peuple juif

Pour consolider l’unité du peuple juif il serait bon que nous commémorions souvent le commandement de Hakel; que se soit au moment de Yom Kipour ou en toute autre occasion.

Nous devons bien comprendre, également, que les différents courants de pensée du judaïsme ne concernent que certains aspects de la tradition et non pas l’essentiel de ses valeurs. Valeurs dont nous ne devons pas trop nous éloigner. Gardons toujours en mémoire certaines d’entre elles : la connaissance, le respect des différences, le dialogue et l’amour du prochain. Restons ainsi rassemblés dans nos différences.

Paracha Nitsavim : l’alliance pour tous, au présent !

L’alliance entre Dieu et les hommes est le socle de la tradition juive.

Une alliance n’est pas seulement un accord ou un pacte; c’est aussi une union, un ensemble qui génère une entité. L’alliance entre l’Eternel et les enfants d’Israël a généré une entité spirituelle, la religion juive. Les enfants d’Israël sont devenus le peuple juif. Liés entre eux par une alliance informelle, ses membres ont la charge de son épanouissement présent et futur.

Par ailleurs, au sein du peuple juif, le principe d’alliance se retrouve au niveau des individus destinés à fonder des couples solides et des familles  très unies.

Ceci s’applique aux autres peuples de façon plus ou moins comparable, et à n’en pas douter, l’alliance, sous diverses formes, est un principe primordial de l’humanité toute entière.

Pour approfondir ce thème, une petite vidéo et un article qui la commente, sur la paracha de la semaine !

La paracha Nitsavim du sefer Devarim (Deutéronome) 29:9 à 30:20 , et l’alliance avec l’Eternel

Le terme « alliance », nous fait penser d’instinct à l’alliance entre Dieu et Moïse au sommet du mont Sinaï. Nous imaginons le mont Sinaï secoué de tremblements, les éclairs, le tonnerre, les enfants d’Israël figés à l’écoute des 10 paroles (commandements). C’est en général comme ceci que nous nous représentons l’instant fondateur de l’alliance.

En fait, l’alliance avec l’Eternel a débuté bien avant. Tout a commencé par l’alliance avec Adam et Ève, suivie par l’alliance avec Noé (considérées, toutes deux, comme des alliances universelles). Se sont déroulées plus tard, l’alliance avec Abraham, Isaac, Jacob, Sarah, Rebecca, Rachel et Léa, puis l’alliance avec Moïse. Celle-ci occupe une position centrale. Elle se rapporte, dans un premier temps, à la sortie d’Égypte et au parcours à suivre jusqu’à la terre de Canaan, puis dans un second temps, aux 10   paroles reçus sur le mont Sinaï.

Dans le texte de la paracha Nitsavim, l’alliance entre Dieu et les enfants d’Israël, sur le point d’entrer en terre de Canaan, est exprimée d’une autre façon par Moïse. Elle est exprimée délibérément au présent :

Devarim 29:9 à 29:12. « Vous êtes placés aujourd’hui, vous tous, en présence de l’Éternel, votre Dieu: vos chefs de tribus, vos anciens, vos préposés, tous les hommes d’Israël, vos enfants, vos femmes et l’étranger qui est dans ton camp, du fendeur de bois jusqu’au porteur d’eau; afin d’entrer dans l’alliance de l’Éternel, ton Dieu, et dans son pacte solennel, par lesquels il traite avec toi en ce jour; voulant t’établir aujourd’hui comme son peuple, et lui-même se montrer comme ton Dieu, ainsi qu’il te l’a déclaré, et ainsi qu’il l’avait juré à tes pères Abraham, Isaac et Jacob. »

Moïse s’adresse à tous ceux qui, à ses yeux, composent le peuple d’Israël. Il s’exprime avec insistance au présent. (Les termes, « aujourd’hui », « en ce jour » sont à relever.) En agissant ainsi, Moïse manifeste sa volonté de renforcer la cohésion de tout son peuple, au présent et au futur.

Sont concernés par l’alliance, reproclamée avec solennité, ceux qui sont autour de Moïse, leurs descendants, et ceux qui rejoindront plus tard le peuple d’Israël.

Devarim 29:13 à 29:14. « Et ce n’est pas avec vous seuls que j’institue cette alliance et ce pacte; mais avec ceux qui sont aujourd’hui placés avec nous, en présence de l’Éternel, notre Dieu, et avec ceux qui ne sont pas ici, à côté de nous, en ce jour. »

A noter que l’on se réfère en général au passé en sociologie des religions : « nous devons faire comme nos ancêtres ; la révélation vient du fond des âges et est éternelle; elle ne peut être mise en doute. » L’événement majeur de notre paracha, la proclamation de l’alliance, se passe au présent. Elle s’adresse à des personnes existantes. Par extrapolation, nous en déduisons que la construction et le destin du peuple juif sont directement, et à tout moment, entre les mains de l’ensemble de ses membres.

Cela semble inquiétant de confier le sort du peuple juif à tous les juifs, à n’importe quel juif. Cependant, il n’est pas rassurant non plus de confier cette tâche à une poignée de leaders, quelques fois lointains, qui auraient autorité sur ce qui nous touche au plus profond.

La Torah prend position pour la première hypothèse :

Devarim 30:11 à 30:14. « Car cette loi que je t’impose en ce jour, n’est ni trop difficile pour toi, ni trop lointaine. Elle n’est pas dans le ciel, pour que tu dises: « Qui montera pour nous au ciel et nous l’ira quérir, et nous la fera entendre afin que nous l’observions? Elle n’est pas non plus au delà de l’océan, pour que tu dises: « Qui traversera pour nous l’océan et nous l’ira quérir, et nous la fera entendre afin que nous l’observions? Non, cette parole est tout près de toi: tu l’as dans la bouche et dans le cœur, pour pouvoir l’observer! »

L’avenir du judaïsme

Madame le rabbin Floriane Chinsky est titulaire d’un DEA en sociologie du droit dont le sujet est le mode d’attribution de l’identité juive par les rabbins. Elle est également titulaire d’un Doctorat en sociologie du droit dont le sujet de thèse concerne les  représentations sociales de la flexibilité de la loi juive. Le DEA étudie les rabbins, qui sont importants dans la création du devenir du peuple juif, le doctorat se concentre sur les individus, dont l’importance est peut être plus grande encore puisque c’est chaque juif et juive qui choisit ou non de recevoir l’enseignement d’un rabbin, et qui choisit quel rabbin deviendra son  »  maître   » (au sens de professeur).

Le message transmis par la paracha est le suivant : l’avenir du judaïsme est tracé par chaque membre du peuple juif dans son environnement familial et social, en relation avec les institutions religieuses dont le rôle est l’enseignement, l’étude et la réflexion collective.

Absolument tous les membres du peuple juif sont responsables de l’avenir du judaïsme, « du fendeur de bois jusqu’au porteur d’eau », comme le dit la paracha. La perpétuation du judaïsme n’est rien d’autre que le renouvellement constant de l’alliance entre Dieu et les enfants d’Israël, pour ne pas dire les hommes. Chacun et chacune compte à part égale et est responsable de se faire entendre! 

 

Pourquoi Dieu n’utilise-t-il pas la violence contre les « fausses religions » ?

Avoda zara 54b

Dieu semble se compliquer la vie. S’il n’aime pas les cultes idolâtres, pourquoi ne pas tout simplement les détruire ? Pourquoi ne pas détruire ceux qui le défient ouvertement ? Telle est la question posée par les sages des nations à Israël d’après le Talmud.

C’est une bonne question. Pourquoi Dieu n’utilise pas lui-même la violence ? La violence peut-elle résoudre les conflits religieux ? Est-il légitime de s’approprier la « volonté de dieu » pour défendre l’un ou l’autre culte ?

Pour les sages du Talmud, Dieu lui-même s’interdit la violence, et respecte la liberté de croyance de chacun. Le monde poursuit son cours, à charge pour nous de le rendre aussi bien que possible. Voilà en tout cas l’une des réponses apportées par notre sougia ce mercredi.

(Attention, le texte suivant est traduit à dessein d’une façon proche du texte, pour inviter à participer à l’étude juive dans le respect de sa nature : en face à face, en Hévrouta, avec la compagnie d’un maître. Vous pouvez préparer le texte à l’avance, mais ne restez pas dans cette étape solitaire source de mécompréhension. Merci.)

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On enseigne dans la michna on a demandé aux anciens à Rome s’il n’aime pas le service des étoiles pourquoi ne l’annule-t-il pas ils leur ont dit si ils servaient des choses dont le monde n’a pas besoin il l’annulerait voici qu’ils servent le soleil et la lune et les étoiles et les constellations il va détruire son monde à cause des fous ils leur dirent si c’est ainsi qu’il détruire les choses dont le monde n’a pas besoin et qu’il laisse les choses dont le monde a besoin ils leur dirent et aussi nous soutenons les mains de ceux qui disent ce sont des divinités puisque elles n’ont pas été détruites

 

Guémara les sages ont enseigné les sages des nations ont demandé aux anciens à Rome si leurs dieu ne désire pas le service des étoiles pour quelle raison ne l’annule-t-il pas ils leur dire si ils servaient une chose une chose dont le monde n’a pas besoin il l’annulerait or ils servent le soleil et la lune et les étoiles et les constellations il va détruire le monde à cause des fous mais le monde se conduit selon sa conduite et les fous qui le détruisent finiront par être jugés autre chose voici qu’il a volé un séa de blé et l’a planté dans le sol est-ce justice qu’il ne pousse pas mais le monde se conduit selon sa conduite et continue et les fous qui le détruisent finiront par être jugés autre chose voici celui qui a des relations avec la femme de son prochain est-ce justice qu’elle ne tombe pas enceinte mais le monde se conduit selon sa conduite et continue et les fous qui le détruisent finiront par être jugés et c’est ce qu’a dit rech lakich le saint béni soit-il a dit je ne juge pas les méchants qui rendent mon effigie sans valeur mais qui m’oppressent et s’attribuent ma signature sans mon accord.

מתני’ שאלו את הזקנים ברומי אם אין רצונו בעבודת כוכבים למה אינו מבטלה אמרו להן אילו לדבר שאין צורך לעולם בו היו עובדין היה מבטלו הרי הן עובדין לחמה וללבנה ולכוכבים ולמזלות יאבד עולמו מפני השוטים אמרו להן א »כ יאבד דבר שאין צורך לעולם בו ויניח דבר שצורך העולם בו אמרו להן אף אנו מחזיקין ידי עובדיהן של אלו שאומרים תדעו שהן אלוהות שהרי הן לא בטלו:

גמ ת »ר שאלו פלוסופין את הזקנים ברומי אם אלהיכם אין רצונו בעבודת כוכבים מפני מה אינו מבטלה אמרו להם אילו לדבר שאין העולם צורך לו היו עובדין הרי הוא מבטלה הרי הן עובדין לחמה וללבנה ולכוכבים ולמזלות יאבד עולם מפני השוטים אלא עולם כמנהגו נוהג ושוטים שקלקלו עתידין ליתן את הדין דבר אחר הרי שגזל סאה של חטים [והלך] וזרעה בקרקע דין הוא שלא תצמח אלא עולם כמנהגו נוהג והולך ושוטים שקלקלו עתידין ליתן את הדין דבר אחר הרי שבא על אשת חבירו דין הוא שלא תתעבר אלא עולם כמנהגו נוהג והולך ושוטים שקלקלו עתידין ליתן את הדין והיינו דאמר ריש לקיש אמר הקב »ה לא דיין לרשעים שעושין סלע שלי פומבי אלא שמטריחין אותי ומחתימין אותי בעל כרחי

 

 

Quelle vision a-t-on ici du « miracle » ? Qu’apprenons-nous sur la liberté de croyance de l’homme ? Sur l’intervention de dieu ou non dans le quotidien humain ? La violence est-elle un moyen légitime de faire avancer une cause ?

Texte à télécharger en cliquant sur le lien suivant: talmud 5777 -1 Avoda zara 54b